Il y a des visions nocturnes dont j’aimerais bien me débarrasser, mais elles s’accrochent comme ces chapeaux chinois sur les rochers en Bretagne.
J’essaye de ne plus y penser, mais l’effet est inverse, j’y pense encore plus. Cela devient obsessionnel.
Je me dis que je vais l’écrire, décrire l’image et que peut être enfin elle s’effacera.
Ce que je vois : la salle d’attente des pré -décédés, elle est immense car nous sommes dix- huit millions de Français.
C’est une salle très haute, un hall de gare gigantesque subdivisé en une cinquantaine de salles. Il y a des numéros un peu incompréhensibles. Sans doute des dates de naissance.
C’est comme un immense aéroport.
La salle du départ imminent et du dernier voyage accueille 2000 personnes, carte vitale à la main, numéros de sécurité sociale inscrits dans le dos.
C’est la charrette quotidienne. Pour les autres l’attente peut être longue.
Je suis assailli par le tragique de chiffres. Combien faudra t-il d’aides à la personne, de salles des soins palliatifs, d’Ephad pour absorber cette masse de 18 0000 candidats. Et puis les cimetières et les crématorium, c’est une industrie vertigineuse, le ministre de la vie qui s’en va sera vite débordé.
Il y a une salle annexe, celle des rédactions de testaments, des notaires sont prêts à vous aider, il y a des salles d’adieux, la séparation d’avec les familles, il y a des salles remplies des meubles de maisons vidées, et de vêtements qui ne serviront plus. Et toutes ces photos, ces albums, ces lettres, un immense amas.
C’est le renouvellement générationnel, nul ‘y échappera, du plus riche au plus pauvre.Faut tout de même se réjouir que dans le marasme d’inquiétudes, il reste des certitudes indiscutables : nous ne sommes pas immortels.
Nous sommes ainsi faits que que nous préférerions qu’à nous au moins ça n’arrivera pas.
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