C'est le 18 mai 1991 que j'ai été victime avec l'Unité d'un attentat à Jérusalem. Ce qu'il reste de mion carnet.
Ma tête est telle un grenier parcouru par des loirs qui galopent.
J’ai des phrases- sentences qui me labourent la chair.
“Je suis de la race qui chantait dans le supplice” à quoi pense t-il Rimbaud il y a cent cinquante ans ?
Et puis aussi celle de Camus : mal nommer les choses c’est ajouter du malheur du monde.
Il est curieux de constater que juifs et arabes sont unis dans la même configuration, ils sont mal nommés.
Un juif c’est compliqué à expliquer, puisqu’il y a confusion entre peuple et religion, et puis voilà t’es français et pourtant juif. et pourtant d’origine russe, mais à l’époque l’Ukraine c’était la Russie.
Ton père avait un gros accent ? T’es qui toi ?
Arabe cela ne veut pas dire musulman, arabe, c’est une émigration d’Arabie, alors les kabyles, les berbères ne sont pas arabes.
Après il y a toutes sortes de croyances sans aucune vérité historique, mais c’est comme ça, les hommes adorent croire de fausses histoires. Lors de nos tournées en Israël, on tombait sur des illuminés qui expliquaient que la Palestine ça n’a jamais existé, que ces salauds d’arabes ont construit la mosquée Al Aqsa sur les ruines du temple de Salomon et qu’il serait bientôt temps de détruire cet édifice et reconstruire le temple en dessous dont il resterait le mur, où l’on se lamente.
Et puis aussi surprise : Attay Citron directeur du festival de Bat Yam, me demande à Tel Aviv si je préfère manger juif ou arabe ?
Magnifique restaurant arabe, face à la mer,-et il m’explique qu’il vit dans un quartier arabe à Jaffa, ses voisins arabes sont ses meilleurs amis.
Et puis ces yemenites qui font un si excellent Houmous à Tel Aviv sont ils juifs ou arabes ? Je dois revoir mes fiches.
Et puis Haïfa, St Jean d’Acre et puis ces deux millions d’arabes de nationalité israélienne, ils vivent bien cote à cote ?
Alors pourquoi pas un seul Etat pour deux peuples ?
Je discute avec un sympathique français qui a fait son allia, il m’explique qu’ici on n’a plus de marge pour une pensées originale, ou pacifiste, ou respectueuse des palestiniens, on est pris dans le flux, on est conditionné, on ne quitte jamais son arme.
Et on passe une belle soirée dans une belle maison, ce stagiaire est le fils du conservateur du musée de Tel Aviv, oui elle a du cachet cette maison, c’est une des belles conquêtes de 1967, nous dit-il.
Ça ne te gêne pas de vivre dans une maison dont les propriétaires ont encore la clef ?
Il me répond : c’est ça le sens de l’histoire. Tous les pays se construisent sur des conquêtes.
J’ai pas fini.
Nous jouons à Jérusalem, Mozart au chocolat, on va visiter le vieux quartier, la médina. On a garé la voiture de location dans une grande avenue. Au retour de nos petites emplettes, la bagnole a été incendiée, je m’adresse au café voisin, on me dit : c’est l’intifida, c’est ça Jérusalem, on vous a pris pour des espions israéliens. Je sauve un de mes précieux carnets à moitié carbonisé. Les attentats ça n’arrive pas qu’aux autres.
Je visite une colonie, c’est fou, c’est construit sur des champs d’olivier appartenant à des paysans palestiniens.
Un colon m’explique : on est chez nous ici. Les palestiniens ne vont pas nous faire croire qu’ils sont chez eux !
Quelle violence tout ça. Ça ne demande qu’à péter, et là on entre dans le vif du sujet, la terrible attaque du 7 octobre 2023. Hamas terroriste ou résistant ? On s’empoigne sur la sémantique.
Un ami israélien m’envoie un film qui prouve que la Palestine n’existe pas .
La suite, on la connait : la vengeance, et moi je persiste à dire : on n’a jamais gagné une guerre contre un peuple.
Les hommes aux sandales de caoutchouc, valeureux vietnamiens ont gagné la guerre contre les USA.
Et les milliers de bombes israéliennes ne font que renforcer le Hamas.
En principe la guerre n’aurait dû durer que quatre mois.
Elle est financée par les Etats Unis et leur quatre milliards de dollars d’aide. Il suffirait simplement de couper les vivres à Tsahal et trois jours plus tard la guerre s’arrêterait.
La leçon de l’histoire ? foutaise. Je me fâchais contre mon père il y a quarante ans.
-Après ce que tu as vécu : la perte à Sobibor de ta mère et de ta soeur, tu devrais juste te dire qu’aucun juif n’a le droit d’humilier le moindre peuple, même pas une araignée tu n’as pas le doit de la tuer.
Mon père ne m’entend plus, personne autour de moi ne m’entend.
Et moi une armée de loirs galope dans ma tête, il est 4 H 45.
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